Etablissement Public Territorial de bassin Orb et Libron

prenons soin de notre territoire

Travaux de desembâclement des berges de l’Orb sur le Biterrois

Les derniers travaux de cette ampleur, destinés à restaurer et désembâcler les berges du fleuve, remontent à plus de vingt ans

La barge descend doucement le fleuve. Grâce à son faible tirant d’eau, elle s’immobilise près de la berge, à la hauteur de l’ex-usine Cameron, où un arbre est en passe de tomber à l’eau. Alors qu’un bûcheron démarre sa tronçonneuse, l’opérateur de la grue se saisit du tronc pour éviter qu’il ne tombe avec trop de fracas dans l’eau :

« Parfois, il faut couper sur la berge. Parfois, c’est une branche qui dépasse de l’eau mais tout un arbre nous attend dans la vase », commente Cédric, pilote de l’embarcation de l’entreprise forestière audoise Holtzinger.
 

Cette équipe de trois personnes est partie de Thézan, il y a un an, et ce n’est que la semaine dernière qu’elle a pu franchir les ponts de Béziers, en attendant d’arriver à la mer, 18 kilomètres plus loin. Encore un an auparavant, le terrain avait été étudié par les spécialistes de l’Etablissement public territorial de Bassin Orb et Libron (EPTB), afin de marquer les arbres à abattre, les zones à nettoyer. « L’objectif n°1 est de dégager le lit de l’Orb pour éviter les inondations, comme celle de 2022, quand une arche du Pont-Vieux avait été complètement bouchée par des troncs et de la végétation », explique Alain Guerrero, responsable des travaux pour l’EPTB.

Depuis 2018, c’est une structure intercommunale qui a la compétence pour la « gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations ». Une réforme nationale qui, selon Alain Guerrero, change tout :  » Avant, on nettoyait le fleuve après un drame, après une inondation. Aujourd’hui, on peut mutualiser les moyens, planifier des programmes pluriannuels, établir des priorités, et faire du préventif. » Cela faisait plus de vingt ans que ce secteur de l’Orb n’avait pas bénéficié de travaux de cette ampleur, et surtout, c’est la première fois qu’ils sont entrepris depuis le fleuve : « Cela permet d’accéder partout, sans abîmer les rives du fleuve avec des engins de chantier. » 

Normalement, ce sont les propriétaires des terrains attenants qui sont responsables de l’entretien des berges. Mais comme souvent en France, beaucoup ne le font pas. La collectivité doit donc intervenir, en respectant un cadre légal. « Pour que nous puissions engager des fonds, il faut une enquête d’utilité publique, validée par un arrêté préfectoral », précise Alain Guerrero.

Il faut dire que les travaux peuvent être titanesques, et souvent insurmontables pour un particulier. En deux jours, sur quelques centaines de mètres, les mariniers d’Holtzinger ont amassé une montagne de troncs et de bois morts. Une partie est revendue à une entreprise qui transforme ce matériau en plaquettes pour les chaufferies industrielles, une autre est utilisée directement par les riverains. Mais la barge ne ramasse pas que des végétaux. En aval de Béziers, les arbres sont constellés de lambeaux de plastique, portés par les crues à plusieurs mètres au-dessus de l’eau. « Sur trois kilomètres, on a récolté quatre tonnes de plastique, et notamment des sacs de Mammouth Béziers qui a fermé à la fin du siècle dernier ! En vingt ans, j’ai vu une explosion de cette pollution, déplore Alain Guerrero. Traiter ces plastiques représente une part de plus en plus importante de notre budget. »Ce nettoyage du lit de l’Orb va se prolonger jusqu’à Valras, afin de faciliter l’écoulement fluvial jusqu’à la mer. En supposant qu’il y aura toujours de l’eau dans l’Orb : à cette saison, le débit devrait être d’une trentaine de mètres cubes par seconde… Et il est inférieur à dix mètres cubes.

La vigie des crues biterroises

Michel Latorre, figure du quartier du Faubourg, président local du Souvenir français, est aussi devenu un spécialiste de l’Orb, de ses caprices, et un interlocuteur privilégié des autorités. « Au Faubourg, on a cette culture, explique-t-il. Quand c’est inondé, les gens ne s’affolent pas : ils ouvrent portes et fenêtres, et ils attendent que ça sèche. »  

Membre de la Commission locale de l’eau, il est aussi un familier du « poste de crue », un local où historiquement les habitants se rassemblent pour surveiller la montée des eaux en amont, et prévoir l’arrivée du pic à Béziers. Il a été créé après les inondations catastrophiques de 1953, autour d’un grand tableau où l’on pouvait lire l’évolution du niveau de l’Orb, parfois heure par heure. 

 Aujourd’hui, tout ce réseau est informatisé. Et l’Orb semble (pour l’instant) moins tempétueux. « Les aménagements faits dans la traversée de Béziers ont été efficaces, remarque Michel Latorre.  Avant, avec 650 mètres cubes, ça débordait sur le faubourg ; maintenant, quand on dépasse les 1 000, comme en 2022, on a peu de dégâts. Après, quand on doit faire face à des crues centennales, il faut bien que l’eau puisse passer. »

 La  vigilance des riverains, cependant, reste importante. « Quand un arbre tombe et qu’il bouche le fleuve, les gens m’appellent. Et quand des fonctionnaires ou des techniciens aux chaussures cirées viennent sur le terrain, c’est moi qui les guide. Je sais où sont les problèmes. »

Midi Libre / Frédéric FAUX